Fermer les salles de consommation de drogue serait une « catastrophe sanitaire et sociale », s’alarment des soignants

Une salle de consommation de drogue à moindre risque dans le 10e arrondissement de Paris, le 11 octobre 2016. VOISIN / PHANIE VIA AFP
Les « haltes de soins addictions », parfois appelées « salles de shoot », vont-elles disparaître ? L’expérimentation des deux seules structures françaises qui permettent de consommer de la drogue de manière encadrée, à Paris et à Strasbourg, doit s’achever à la fin de l’année 2025. Pour l’heure, aucune mesure juridique ne permet de sécuriser ces dispositifs créés en 2016 à titre expérimental. Mercredi 5 novembre, une proposition de loi transpartisane a été déposée au Sénat pour pérenniser ces lieux de soins.
« Toutes les évaluations sont positives en matière sanitaire comme de sécurité. Il n’y a aucune raison de les fermer », a expliqué à l’Agence France Presse (AFP) l’auteure du texte, la sénatrice écologiste de Paris Anne Souyris.
La proposition de loi sénatoriale, cosignée par des élus de toute la gauche mais également par certains sénateurs centristes et Les Républicains, entend ainsi faire entrer cette expérimentation « dans le droit commun ».
A lire aussi
Enquête Dans le quartier de la salle de shoot de la gare du Nord : « C’est faux de dire que c’était mieux avant »
La fermeture des salles de consommation de drogues serait une « erreur historique » et une « catastrophe sanitaire et sociale », insistent également une quarantaine de médecins, addictologues et professionnels de santé dans une tribune publiée ce jeudi par le journal « le Monde ». « Fermer les salles de consommation serait un signal dramatique : celui d’une France qui renonce à la science, à la raison et à sa tradition humaniste : ce serait abandonner les plus vulnérables à la rue, à la maladie et à la mort », écrivent-ils.
« Revenir en arrière serait une faute morale et une erreur historique », ajoutent-ils, appelant gouvernement et parlementaires à agir en modifiant le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2026. Car « aucun pays au monde n’est jamais revenu sur cette politique une fois adoptée, tant les résultats sont probants : baisse du nombre de surdoses, réintégration dans le soin » de personnes souvent « très précarisées » et « atteintes de maladies chroniques et psychiatriques », « apaisement de l’espace public », plaident ces soignants, citant la Suisse, qui les a mises en place dès les années 1990, et l’Allemagne.
« Les salles améliorent la tranquillité publique »Durant ces expérimentations, plusieurs études ont évalué positivement ces salles de consommations de drogue notamment celle de l’Institut national de la Santé et de la Recherche médicale (Inserm) publiée en 2021, et celle de l’Inspection générale des Affaires sociales et de l’Administration.
« Les salles améliorent la tranquillité publique en diminuant les consommations de rue » et « n’engendrent pas de délinquance », affirme leur rapport daté d’octobre 2024, qui souligne la baisse significative du nombre de seringues ramassées par jour dans les rues de Paris, passées en huit ans de 150 à moins de 10.
A lire aussi
Interview « Ce serait une perte de chance sanitaire et sociale » : pourquoi les associations s’inquiètent de la possible fermeture des « salles de shoot »
Compte tenu du calendrier parlementaire très chargé par les débats budgétaires, l’examen de la proposition de loi sénatoriale paraît impossible avant 2026. Mais la discussion sera au menu du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, durant lequel Anne Souyris défendra également des amendements en ce sens.
Le gouvernement a déjà déposé un amendement à ce sujet dans le projet budget de la Sécu examiné en ce moment à l’Assemblée. Il entend de son côté non pas pérenniser les HSA, mais prolonger leur expérimentation jusqu’en 2027.
Par Service Actu (avec AFP)
Le Nouvel Observateur




